Depuis quelques mois, le no-code fait une entrée en force dans le paysage Internet. Cette méthode est souvent présentée comme innovante alors qu’il n’en est rien. Je vous explique pourquoi.
Au commencement, les librairies logicielles
Dès les débuts de l’informatique, les programmeurs, qui n’étaient pas encore des codeurs, ont développé des habitudes de travail destinées à optimiser leur temps. Ils ont rapidement compris qu’écrire des dizaines de fois les mêmes lignes de programme, qui n’étaient pas encore des lignes de code, était une perte de temps.
Ils ont commencé à sauvegarder des bouts de programmes qu’ils ont rapidement regroupé en bibliothèques ou librairies logicielles. Ces librairies logicielles leur servaient à réutiliser des programmes, ou des routines, déjà écrites et validées. Cette technique générait des gains de temps, et donc d’argent, énormes.
Les programmeurs ont même pris l’habitude de partager leurs bibliothèques de codes entre eux.
Puis des sociétés se sont spécialisées dans la création et la vente de ces bibliothèques logicielles à destination des programmeurs. Ainsi les premières briques de leur production étant déjà développées, ils pouvaient se consacrer à créer des fonctions spécifiques à plus forte valeur ajoutée.
En regroupant de nombreuses bibliothèques, ces mêmes sociétés spécialisées dans la fourniture de librairies logicielles ont inventé les frameworks.
Ces frameworks regroupaient de nombreuses librairies et proposaient des environnements de développement évolués et complets.
On ne parlait pas encore de low-code, mais c’en était les prémisses.
Puis virent les CMS…
On estime que les premiers CMS (Content Management Systems) sont apparus à la toute fin des années 90. Il s’agissait de l’évolution normale des frameworks.
Un CMS est un outil informatique destiné aux utilisateurs qui souhaitent gérer des contenus sans écrire la moindre ligne de code.
On ne parlait pas de no-code, mais il s’agissait bien de ça ! Le concept du no-code est donc apparu à la toute fin du vingtième siècle…
Oui, il y a plus de vingt ans !
Depuis cette époque, le nombre de CMS a considérablement augmenté, à tel point que je suis bien incapable d’en dresser la liste.
…et les plateformes de création de sites Web
Je ne saurai dire à quelle période ces plateformes de création de sites Web sont apparues. C’est probablement assez récent.
Elles existent parce que ce qu’elles proposent, créer des sites Web simples, est facile à faire en mode SaaS.
Quelques mots sur le mode SaaS
L’apparition des plateformes de création de sites Web est liée à la généralisation du mode SaaS (Software as a Service). Le mode SaaS est la déportation des logiciels qui restent sur un serveur et ne sont plus installés sur un poste local. C’est l’évolution constante de la puissance des ordinateurs de bureau et autres appareils portables ainsi que l’amélioration continue de la bande passante Internet qui a permis cette évolution.
L’utilisateur peut donc travailler depuis un ordinateur moins puissant puisque tous les calculs se font sur le serveur distant. Mais il doit être connecté à Internet pour pouvoir travailler.
Il suffit de comparer le logiciel local MS Excel et Google Sheets (mode SaaS) pour bien comprendre la différence.
En outre, et c’est ce qui explique leur large diffusion, le business-model de ce type de solutions apporte également un avantage important à ses éditeurs qui peuvent ainsi louer leurs produits sans risquer de voir des pirates les exploiter illégalement.
Revenons aux plateformes
On peut constater que de nombreuses plateformes de création de sites Web existent. Elles mettent en œuvre le mode SaaS.
J’ai déjà écrit un article sur ces plateformes de création de sites, mais ce que je peux dire, c’est que si c’est relativement simple d’y créer un site, ces plateformes sont loin d’être les solutions les plus performantes pour le référencement et pour faire du e-business en général. Même si elles disent toujours le contraire.
Certaines plateformes de boutiques en ligne sortent un peu du lot mais cela reste assez anecdotique.
WordPress les a tous dépassé
Le CMS WordPress, probablement le plus connu d’entre tous, est apparu dans sa première version au cours de l’année 2003, le 27 mai pour être précis.
Dans l’équipe, nous avons créé notre premier site WordPress au début 2004. Souvenirs, souvenirs !
Aujourd’hui, on estime que plus de 35% des sites Web sont des sites WordPress.
WordPress est donc le CMS le plus utilisé et il en existe deux versions.
En mode do-it-yourself
WordPress peut être téléchargé gratuitement et installé sur un serveur. Cela permet à quasiment n’importe qui de créer un site Web basique assez simplement sans trop de compétences informatiques.
En fait, si on veut être précis, c’est un mode SaaS qu’on installe soi-même.
L’avantage de cette option est sa grande souplesse qui permet de nombreuses optimisations chères à notre ami Google. Cette solution est excellente pour le référencement naturel.
En mode SaaS prêt à l’emploi
WordPress peut également être utilisé en mode SaaS. Bien qu’un peu plus limité que la version DIY, il ne nécessite aucun achat d’hébergement pour fonctionner. Il s’agit d’une plateforme de création de sites Web, gratuite et simple d’usage.
Notez que l’export d’un WordPress SaaS vers un WordPress DIY est possible et très facile à réaliser.
WordPress est un CMS no-code
Basé sur un système de templates et de plugins, très nombreux, WordPress est une plateforme no-code (qui existe donc depuis 2003).
Grâce à la quantité astronomique de plugins qui existent et à la possibilité d’en créer de nouveaux, WordPress est une plateforme qui permet l’ajout de fonctionnalité complexes, sans écrire une seule ligne de code.
Dans certains cas, il est indispensable de développer ses propres plugins. Alors, WordPress devient une plateforme low-code.
Mais, en cas de trop forte complexité, WordPress peut s’avérer être une usine à gaz ingérable. Dans ce cas, le choix d’une véritable plateforme no-code peut s’avérer judicieux. Mais ce sera plus onéreux.
Alors, c’est quoi le no-code en 2020 ?
Aujourd’hui, les outils SaaS qualifiés d’outils no-code sont essentiellement constitués de :
- Outils de codage “sans code” comme la plateforme Bubble.io;
- Outils de production de contenus comme des templates vidéos, graphiques ou autres;
- Outils de gestion de projets;
- Outils ERP et CRM;
- Outils de marketing automation;
- Outils de connexions entre applications;
- etc…
Ces outils répondent à la grande majorité des besoins des entreprises.
Conclusions
Donc, toutes ces startups qui se gaussent d’être des innovateurs en promouvant le no-code, sont des menteuses ?
Oui et non.
Oui, parce que, comme nous venons de le voir, le principe même du no-code est antérieur à la création du Web. Elles n’ont rien inventé et surfent sur la méconnaissance des entreprises dans ce domaine.
Et non, parce que la technologie ne permettait pas, jusqu’à récemment, de créer de véritables plateformes no-code, ce qui est devenu le cas en 2020. Car même si BUBBLE.IO a été créée en 2012, ce n’est que depuis 2 ou 3 ans qu’elle voit son utilisation exploser.
Remettons donc les pendules à l’heure !
Et le premier développeur qui passe et qui nous traite de script kiddies, je lui répondrai qu’il est bien cultivé et qu’il a probablement plus de 30 ans…